Dans quelle société voulez-vous vivre ?

"Est-ce dans ce monde-là que nous voulons vivre?" est le titre d'un livre d'Eva Joly qui touche à une question fondamentale, donc très générale. Mais la question est abordée par ce titre avec une telle outrecuidance qu'elle est non seulement biaisée mais occultée. La supercherie consiste à confondre la société dans laquelle on vit avec le monde dans lequel cette société s'insère.

A - NAVIGATION

1 - Orientation

Chaque fois qu'un enfant se pose une question sur son avenir et m'en parle, la première question que je lui pose est celle-ci: "Dans quelle société veux-tu vivre ? Est-ce une société d'hommes libres ou une société d'esclaves? une société de relations mutuelles directes gérées par des pactes ou une société de relations indirectes gérée par des lois? une société où l'on travaille par soi-même parce qu'on aime travailler ou une société où l'on vous fait travailler pour gagner sa vie et la vivre ensuite de la manière la plus cool possible? une vie en équipe ou une vie de rivalités avec course vers les sommet, etc..."
C'est imparfait parce que c'est au présent et qu'il s'agit du futur. La question "Dans quelle société veux-tu entrer ?" serait plus pertinente, mais pas encore satisfaisante car on ne peut pas préjuger des expériences qu'on n'a pas encore faites.
C'est donc une question permanente car elle ne peut recevoir de réponses que provisoires. Il y a néammoins une tendance dominante qu'on peut déceler: soit sortir de son trou, soit s'y blottir parce qu'on s'y sent bien et craint l'inconnu. Et chacun peut dire s'il a plutôt un esprit d'aventure tourné vers la découverte, ou un esprit casanier et craintif. Mais il faut aussi réserver l'avenir.

b - Conduite
Eva Joly déclare qu'en Norvège, on apprend en classe qu'avec une intelligence moyenne, on peut arriver à tout parce que c'est une question de travail et d'application, alors qu'en France la sélection scolaire sévit à tel point que les gens sont inculqués par l'idée que si l'on est dans les quelques premiers on peut tout, sinon, on ne peut rien et dépend de la faveur des puissants.Un journaliste qui s'entretient avec elle évoque la mentalité protestante, mais elle en doute, et pense peut-être à un héritage viking.

B - LA REFORME

 1 - Le protestant qui proteste
Mais pourquoi - Diable ! - transformer un problème d'orientation en un problème de réforme, sinon parce qu'on se croit enfermé dans une société bloquée ? Si on croit au dialogue plutôt qu'au discours, à l'expérience vécue plutôt qu'à la vérité révélée, aux pactes plutôt qu'aux lois, qu'a-t-on à faire de ceux qui préfèrent la vie d'esclave? Il s'agit de se mettre à part, soit en partant comme les Boërs, soit en séparant comme les Flamands (1) ?

2- La protestation qui se contredit.
Je ne sais pas si quelqu'un a jamais écrit l'histoire du péché, mais si quelqu'un l'a fait, c'est assurément un protestant. Eva Joly a fait un travail d'historien en traitant de l''histoire de la corruption avec l'affaire Elf que personne ne connait parce que, d'après ses propres propos, il faut trois mois pour lire le dossier. Mais Tacite n'a pas mis Néron en prison. Même si elle fait un travail d'historien, Eva Joly ne se sent pas historienne mais voudrait changer le monde. La prétention à changer le monde en critiquant le passé est une utopie et Eva Joly finit probablement ar s'en rendre compte et change de cap pour devenir politique.
Mais alors, elle bute sur une nouvelle contradiction car mettre fin à la corruption dans les relations France-Afrique ne peut que faire place à la corruption dans les relations Chine-Afrique, par exemple. Et la résolution de cette nouvelle contradiction conduit à revenir vivre en Norvège, un pays où la corruption ne se pratique pas. On en revient donc ainsi à passer d'un problème de réforme à un problème d'orientation personnelle. Il s'agit de mettre l'environnement qu'on souhaite autour de soi, et tout le reste est littérature ou plutôt médiatisation.
On pourrait lire ses livres et voir le film de Truffaut pour affiner ces conclusions, mais c'est un autre sujet. On peut aussi s'informer, s'informer, s'informer, à n'en famais finir, mais la problématique restera toujours la même. La position de Villepin est aussi solide que celle d'Eva Joly ou autres Gaetner etc.., et cela ne sert à rien de reprocher aux gens d'être ce qu'ls sont. Il ne reste en fin de compte qu'un problème d'orientation. Eva Joly avait épousé un ophtalmologue, peut-être pour y voir plus clair.

"Je suis de cette race
Coriace
Qu eut encore après avoir voulu
Encore, encore et encore plus."
Vehaeren