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26 avril 2010

L'art oratoire, le parasite et l'ôtage.

Au moyen-age, si on voyageait seul, on rencontrait forcément des voleurs qui vous dépouillaient. On a mis des siècles à  pacifier les campagnes et aujourd'hui les voleurs se sont mis ailleurs. Mais dans tous le débats publics, il y a des parasites.

Il y a deux jours, j'écoutais des américains coincés à Paris par le nuage, qu'on avait exhibés dans un séminaire. On traduisait phrase par phrase. L'un d'eux s'est mis à parler français. La traductrice a continué à traduire. On lui a crié "Mais on comprend !". Cela ne l'a pas arrêtée tout de suite. Comme un cheval emballé qui ne sent plus les rènes mais reste dans les brancards elle entrainait son auditoire là où elle voulait le conduire.
Or il m'était déjà arrivé, il y a quelques années, dans le même établissement, de me rendre à une invitation et d'y entendre dire que le conférencier prévu n'avait pas pu venir. Comme j'avais  écrit à celui-ci pour lui demander le texte de sa conférence, j'avais découvert qu'il n'avait jamais été pressenti et que son nom avait été utilisé à son insu pour remplir la salle et procurer un auditoire à un autre.
Et hier, celui qui avait crié "Mais on comprend !" était précisément celui qui autrefois m'avait fait inviter à la conférence sans conférencier et que j'avais donc averti de la supercherie.

Mais le naïf ne sait pas que le parasite existe. Cette ignorance est l'effet contre-productif d'un enseignement moral qui a perdu sa vigueur et qui, au lieu d'inspirer le comportement, fait écran et l'empêche de comprendre ce qu'il voit. Cette manière d'écrire qui fait dire à certains lecteurs de mon blog que je fume mes rideaux, correspond à une manière de voir et de penser affranchie de cette ouate qu'on appelle courtoisie qui obscurcit le regard.

Tout le monde voit tous le jours à la télévision des journalistes se servir de prétendus "invités" comme d''ôtages et se donner par ce moyen la possibilité de prononcer leur propre discours et de le faire entendre aux téléspectateurs. Mais tant que la supercherie n'a pas été clairement et publiquement expliquée et enseignée, elle continue à faire des dupes, comme une fable de La Fontaine amputée de sa moralité ne retiendrait pas l'attention.

Or les médias sont le principal soutien d'un Sarkozy dont l'autoritarisme est inspiré par la haine des français et dont la maladresse est guidée par la démence. La démence et la haine sont contagieuses, et les médias, agents d'infection par vocation, sont, après ses gardes du corps, les familiers du dictateur, entouré ensuite de renégats vénaux qui sont la frange extérieure de la société où il se meut. La fermentation de ce clapotis consiste en une agitation frénétique suivie de patacaisses que les médias enveloppent. Le pouvoir résiduel étant celui des journalistes, la découverte de cette réalité est bien plus déterminante pour l'avenir de l'état français que les aléas de l'emploi ou des relations internationales. C'est ce qui fait la différence entre l'état français naturellement bénin paisible et ridicule, et le prétendu état d'Israël qui vit en état de guerre endémique. Et la découverte que le pouvoir réel est celui des journalistes fait penser à la découverte du pouvoir réel des jésuites au XVIIIème siècle, en sorte que la façade démocratique avec ses idéaux de liberté d'égalité et de fraternité risque de s'effondrer comme la façade chrétienne de la monarchie de droit divin.

Considérer le parasitisme comme une loi de la vie n'est qu'une représentation simplifiée, mais elle vaut par par les compléments et les corrections qu'elle apporte à d'autres représentations couramment utilisées.  De même que l'usage de la monnaie permet de passer du troc aux échanges multilatéraux, le parasitisme permet de corriger la perspective individualiste de toute autre manière qu'en parlant de la relation à l'autre et en restant coincé dans la perspective bilatérale.
A partir du moment où l'on parle de mentalité judéo-chrétienne, le christianisme a cessé d'introduire l'ouverture d'esprit qui permet de passer à une vision multilatérale en parlant de Dieu, C'est ce qu'explique  Mr Marion dans son discours de réception à l'Académie française. Il faut donc bien trouver une autre manière de sortir de la vision bilatérale qui fait voir des émetteurs et des récepteurs de messages quand il n'y a que des transmetteurs. Je ne pense pas que le parasitisme soit la meilleure formule pour produire cette métamorphose de la pensée, mais c'en est une, et il faut absolument déborder la forme d'imbécilité que produit le monothéisme..

D'un seul coup ou progressivement ? Par le refus d'obéissance ou par les élections ? Ce sera probablement intermédiaire, mais dans ces situations la trahison peut jouer un rôle déterminant.

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Commentaires
P
Ouf !<br /> Cela fait du bien de savoir qu'on a, au moins une fois, été compris.<br /> Il faut tellement condenser, c'est-à-dire élaguer, pour pouvoir exposer, qu'on se demande s'il reste encore quelque chose qui permette au lecteur de suivre sa pensée.<br /> Il me reste à ajouter un paragraphe. Il me fallait savoir qu'on pouvait me suivre jusque là pour le tenter.
C
Article très intéressant ; j'ajouterais que les médias sont surtout le principal soutien d'eux-mêmes. Heureusement, il y a facebook !
conversation
  • Croire comprendre est seulement avoir l'impression de reconnaitre quelque chose de déjà connu, tandis que déclarer ne pas comprendre indique qu'on a essayé de comprendre et mérite que j'explique.
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