l'avenir

La France va changer de concierge. Remue-ménage chez les domestiques. Vacarme dans les escaliers. Les domestiques se disputent les balais. Cela devient agaçant. Peut-être qu'il n'y aura pas d'élections présidentielles, il suffirait qu'on supprime la conciergerie. Le syndicat des concierges d'Europe s'est déjà ridiculisé en prétendant s'instituer.

Ce n'est pas la première fois que la France a une conciergerie un peu gonflée. Une première conciergerie, à Versailles, avait servi à mater les intempestifs, qui se nommaient seigneurs, les avait rendus inermes mais pompeux. Cette conciergerie était devenue coûteuse à force de pompe. On l'avait supprimée. Cela ne s'est pas fait d'un coup, il y a eu des résurgences, mais on a fini par y arriver et faire une république. Elle avait bien un président, mais comme Grévy disait qu'il n'en fallait pas, on l'avait nommé président, et il a occupé le fauteuil pour ne rien faire et seulement s'assurer que personne ne s'y mette. Longtemps, c'est resté l'usage.

Mais les ouvriers, arrachés à la nature campagnarde où ils vivaient, transplantés dans des villes plutôt moches, devenaient inempestifs quand ils arrétaient tout (la grève), cassaient tout, (l'émeute) et surtout quand ils tuaient (la révolution). Progressivement, on leur a mis une cravate, et les a installés dans une ville sainte, ville-musée qui a servi de conciergerie à la France. C'est par elle qu'on passe pour y entrer et en sortir. Elle accueille aussi les gens de mauvaise humeur qui s'y rendent en car pour taper du pied sur le macadam devant une porte cochère. C'est aussi là que les malheureux trouvent des bureaux des pleurs et les rigolos des spectacles à leur convenance.

Mais on peut aussi se passer de conciergerie. C'est que la vie se réveille, que la pensée se tourne vers l'action, avec une effervescence sans turbulence.

Et on peut aussi se passer d'élections. C'est que ce rite, privé de croyance religieuse en la démocratie, parait ridicule.

Enfin, on peut se passer de la France. Certains, comme les Corses, le disent à haute voix; beaucoup d'autres le pensent tout bas.

Et de toutes ces possibilité il ressort que l'on ne sait pas grand chose de l'avenir. Mr Sarkozy entre, semble-t-il, dans le rôle de Seyss-Inquart. C'est encore un autre avenir possible, un peu morose....