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4 août 2013

Le sujet

La première pensèe qui me vient en entendant ce mot est l'annotation "hors sujet" que mettent les enseignants en marge des copies de leurs élèves quand ils ne les comprennent pas, ne cherchent pas à les comprendre, et s'en vantent, et se rengorgent. Aucun sujet n'existe autrement que par ses connexions avec son entourage, et la connexion qui l'éclaire le mieux est plus que les autres "hors sujet". Mais quand le dressage des esclaves a réduit leurs facultés mentales à la capacité de surveiller et punir, le « respect, » le « sujet » et « le respect du sujet », sont les marques de leur assujettissement.

1886 Automne chaussures

Néammoins, c'était bien un problème de sujet qui, m'avait conduit, dans un message précédent, à fouiner dans l'oeuvre de Claude Gellée pour en extraire des moulins, moins solennels et plus familiers que les palais, et quand je reproche à Van Gogh de peindre ses croquenots, c'est encore un problème de sujet, comme quand on reprochait à Courbet et aux réalistes qui le suivaient de choisir des sujets vulgaires.

Il semble donc que je me mette en porte à faux en utilisant moi-même un concept dont je critique l'usage. C'est qu'on ne peut pas se faire comprendre autrement qu'en utilisant des concepts compris par ses auditeurs ou ses lecteurs. On n'arrive pas réellement à décrire des concepts incompris et qu'on veut faire comprendre avec des concepts déjà compris, mais quand on utilise plusieurs analogies contradictoires, on fait travailler l'esprit sur des compromis.

A ma connaissance, la meilleure explication qu'on puisse en donner est celle que donne Pascal ; « C'est une maladie naturelle à l'homme de croire qu'il possède la vérité directement; et de là vient qu'il est toujours disposé à nier tout ce qui lui est incompréhensible; au lieu qu'en effet il ne connaît naturellement que le mensonge, et qu'il ne doit prendre pour véritables que les choses dont le contraire lui paraît faux. Et c'est pourquoi, toutes les fois qu'une proposition est inconcevable, il faut en suspendre le jugement et ne pas la nier à cette marque, mais en examiner le contraire; et si on le trouve manifestement faux, on peut hardiment affirmer la première, tout incompréhensible qu'elle est. »

Avec moins de connotation religieuse, on pourrait plus simplement parler de point de vue. Aucun point de vue ne permet de tout voir, mais plusieurs points de vue peuvent se joindre et s'enrichir mutuellement. Ce qui y fait obstacle, c'est la volonté de donner un caractère hégémonique à un point de vue et d'imposer une orientation au regard. Un psychologue croit acquérir une ouverture d'esprit en prenant en considération un autre, mais ce n'est qu'un autre moi et son regard tourné vers le passé s'oppose directement à l'appréhension du futur comme volonté et comme représentation. Dés qu'il entend parler du futur, des dispositifs mentaux comparables à des miroirs dénoncent les projections et retournent violemment le regard du futur vers le passé. De même qu'on ne peut pas jouer aux échecs avec un jooueur de football qui shoote dans les pièces, pour que les réunions réunissent les points de vue, il faut en écarter les psychologues. Leur vie se fonde sur l'écho du passé alors que la science se fonde sur l'expérimentation à venir, et les échos qui se correspondent et s'amplifient étouffent la curiosité et développent ce système qu'on appelle en France la démocratie (1).

Mais on peut se mettre à part en formant un réseau de relations choisies et éprouvées, c'est-à-dire une aristocratie, mais il importe qu'elle reste invisible pour ne pas faire ombrage.

Une fois qu'on est débarassé de l'individualisme, et qu'au lieu de se demander qui est untel, on se demande à quoi il joue, l'inconscient n'est plus un monstre, mais simplement la règle d'un jeu  qu'on applique en général sans y penser, mais qu'on peut énoncer. On repère facilement les gens qui ont remplacé l'écoute par l'interprétation, parce qu'ils veulent comprendre plutôt qu'entendre. Pour eux la règle du jeu, c'est de comprendre, ou de tomber d'accord, ou encore autre chose qui n'est pas entendre.Or, il serait plus sage de s'en tenir à ce dont on dispose réellement, c'est-à dire d'entendre, tout simplement, sans chercher à comprendre, ni à juger. Et ensuite, on se demandera ce qu'on peut en faire (de ce qu'on a entendu), sans plus.

La première chose qu'on découvre alors, c'est qu'on n'arrive pas à se faire entendre parce que son interlocuteur interprète, n'écoute pas, s'attend à ce qu'on lui dise quelquechose, etc… Il faudrait le secouer par les épaules ou répéter 10 fois pour qu'il entende ce qu'on dit et rien d'autre. Cette pathologie de l'écoute n'est pas naturelle, mais produite par l'enseignement, et elle a atteint aujoourd'hui de telles proportions qu'on peut penser qu'il y aura un mouvement de correction.

C'est ce qui s'était produit avec la religion en France. Au moyen-age, la société avait été convertie au christianisme, puis christianisée. Cela avait déjà suscité des réactions et les guerres de religion avaient marqué la société au point de susciter un état qui apaise. Ensuite l'absolutisme de cet état de droit divin avait provoqué une réaction politique et suscité la république. Mais le civisme que réclame la république est intenable, et l'état républicain s'est déguisé en démocratie. Alors une césure s'est creusée et n'a cessé de s'approfondir entre les gouvernants et les gouvernés. Quand j'étais étudiant, cette césure était placée entre les fonctionnaires et les élus, lesquels étaient méprisés. Depuis, les médias se sont interposés et aujourd'hui, ce sont eux qui amusent la populace, en sorte que les élus, squeezés,
tournent en rond, comme l'aristocratie à la fin de l'ancien régime . L'acoquinage élus/médias paraît mûr pour être éliminé, un peu comme l'acoquinage arristocratie/clergé à la veille de la Révolution.

1635 Les lances détail Spinola

La reprise en main du futur, comparable à un réveil, consiste à abolir l'ingérence des gens qui prétendent gérer votre avenir, à mettre fin à l'invasion par l'investissement ou par les royalties, et à revoir le code du commerce pour écarter les actionnaires, tout cela en même temps, sans se soucier du PIB ni des arbitrages, car tout se tient. C'est pourquoi il est difficile d'imaginer sous quelle forme cela se réalisera. La réussite de l'opération sera forcément une surprise, car aussitôt qu'on en entrevoit les modalités, c'est aussitôt fait, en vertu de la « furia francese ». Et ensuite ce qui est accompli n'est plus une prouesse, mais une évidence.

On peut voir dans le romantisme de Musset et de Hugo, ou si vous préférez, de Ruy Blas et de Lorenzaccio, une résurgence de cette émancipation libératrice de la Révolution  qui met fin à l'ignominie de l'assujettissement. Que l'assujettissement revête la forme de l'éducation nationale ou du  procès de Nüremberg, il abuse de la force. Et la dénonciation de cet abus, partout où il se lmet, entraine un renversement général qui entraine l'abolition du concept même de respect en se faisant respecter.

 

1 « État de société qui exclut toute aristocratie constituée, mais non la monarchie. On dit en ce sens : la France est une démocratie.» Littré

 

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  • Croire comprendre est seulement avoir l'impression de reconnaitre quelque chose de déjà connu, tandis que déclarer ne pas comprendre indique qu'on a essayé de comprendre et mérite que j'explique.
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